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    L’étude IFCT-1103 ULTIMATE est une étude IFCT qui avait pour objectif d’évaluer l’efficacité d’un nouveau traitement : l’association du bévacizumab et du paclitaxel. C’est une étude destinée aux patients atteints d’un cancer du poumon, un cancer bronchique un peu particulier que l’on appelle le cancer bronchique non à petites cellules de type non épidermoïde. C’est finalement le sous-type de cancer le plus fréquent et on s’est intéressé aux patients atteints de ce type de cancer du poumon à un stade avancé. Quand je dis « avancé » cela veut dire des patients pour qui on ne peut pas proposer de la chirurgie ou de la radiothérapie. Dans ces cas-là, les patients reçoivent un traitement à base de chimiothérapie en première intention mais ce traitement au bout d’un certain temps perd de son efficacité c’est ce que l’on appelle la progression tumorale. Lorsque l’on est face à une progression tumorale après une première chimiothérapie, on cherche à proposer un deuxième traitement à base le plus souvent de chimiothérapie. On a déjà plusieurs molécules disponibles dans cette indication, c’est-à-dire après échec d’une chimiothérapie, notamment du docétaxel qui est une chimiothérapie qu’on connait bien mais qui a une efficacité relativement limitée et une toxicité qui n’est pas négligeable.

    L’objectif de l’étude IFCT-1103 ULTIMATE était d’évaluer l’efficacité d’un nouveau type de traitement pour voir si ce nouveau traitement était d’une part plus efficace et d’autre part mieux toléré que le docétaxel. Le traitement que l’on a évalué est une association de paclitaxel, qui est une chimiothérapie que l’on connait bien qui est utilisée dans de nombreux cancers, au bévacizumab. Le bévacizumab est ce que l’on appelle un anti-angiogénique c’est-à-dire que c’est un médicament qui va agir sur la vascularisation de la tumeur pour essayer d’empêcher que la tumeur ne grossisse en la privant des nutriments dont elle a besoin pour grossir. Cette chimiothérapie, cette association de ces deux produits, avait déjà été utilisée dans d’autres types de cancers notamment dans le cancer du sein et on savait par des études préliminaires qu’elle avait une certaine efficacité aussi dans le cancer du poumon. On a donc décidé de monter une étude qui est une étude de phase 3, c’est-à-dire une étude qui avait pour objectif de démontrer l’efficacité de ce nouveau traitement, de cette association de paclitaxel et bévacizumab, par rapport à un autre traitement qui est considéré aujourd’hui comme le standard, c’est-à-dire le docétaxel, qui est un autre type de chimiothérapie actuellement utilisé.

    En ce qui concerne la méthodologie de cette étude nous avions prévu d’inclure environ 166 patients. Ces patients étaient tirés au sort pour recevoir soit le nouveau traitement par bévacizumab et paclitaxel soit le traitement considéré comme le standard au moment du lancement de l’étude le docétaxel. Il y avait deux fois plus de chances de recevoir le nouveau traitement ce qui était fait pour encourager et faciliter les inclusions des patients dans cette étude, pour que les patients aient plus de chance de recevoir le nouveau traitement. Les patients recevaient ensuite le traitement jusqu’à ce que la maladie progresse, c’est-à-dire aussi longtemps que le traitement était efficace. Il était poursuivi et des scanners étaient réalisés très régulièrement pour déterminer le moment où le traitement ne faisait plus effet et à ce moment-là le traitement était arrêté.

    Les résultats de l’étude IFCT-1103 ULTIMATE sont très intéressants car l’étude est positive, c’est-à-dire qu’elle a réussi à démontrer l’efficacité de l’association de bévacizumab et de paclitaxel par rapport au standard le docétaxel. Cela a été démontré sur le critère de jugement principal de l’étude, c’est à dire le paramètre qui était considéré comme le plus important dans cette étude qui était la survie sans progression, c’est-à-dire le temps entre le moment où le traitement a démarré et le moment où la maladie a progressé (c’est-à-dire la tumeur a grossi de façon significative au scanner ou jusqu’au décès du patient). L’étude IFCT-1103 ULTIMATE était positive, c’est-à-dire que l’association de bévacizumab et de paclitaxel augmentait la survie sans progression de façon significative. Si on s’intéresse à la médiane de cette survie sans progression elle était de 5,4 mois dans le groupe paclitaxel et bévacizumab alors qu’elle était de 3,9 mois chez les patients traités par docétaxel. Cette différence était significative. Le hazard ratio était à 0.62 ce qui signifie qu’il y avait 38% de risque en moins de présenter une progression tumorale ou un décès du patient chez les patients exposés à l’association bévacizumab et paclitaxel par rapport à ceux exposés au docétaxel. Par ailleurs cette étude a démontré qu’il y avait un taux de réponse plus important avec l’association paclitaxel et bévacizumab. Le taux de réponse est le pourcentage de patient dont la tumeur a diminué de taille de façon significative c’est-à-dire d’au moins 30% de son plus grand diamètre. Cette étude est également intéressante pour évaluer la tolérance de ce traitement. Ce que l’on a constaté c’est que l’association de bévacizumab et de paclitaxel entrainait moins d’effets secondaires de type hémathologique (c’est-à-dire les effets secondaires qui vont affecter les globules blancs notamment et également les globules rouges et les plaquettes), il y avait moins de complications de ce type avec cette association. En revanche, il y avait plus d’effets secondaires à type de neuropathie, une atteinte des petits nerfs, à type d’hypertension également et de protéinurie. Ces évènements indésirables étaient plus élevés chez les patients traités par paclitaxel et bévacizumab. On s’est également intéressé dans cette étude à la survie des patients. On constate qu’il n’y avait pas de différence de traitement entre les patients qui avaient reçu le paclitaxel et le bévacizumab et les patients qui avaient reçu le docétaxel en termes de survie. Ceci peut s’expliquer par le fait que les patients qui recevaient le docétaxel à la progression pouvaient recevoir l’association paclitaxel et bévacizumab et en tirer bénéfice.

    En conclusion, cette étude démontre la supériorité de l’association bévacizumab et paclitaxel par rapport au docétaxel chez les patients porteurs d’un cancer bronchique non à petites cellules de type non épidermoïde qui ont déjà reçu une chimiothérapie au préalable. Cette supériorité est démontrée en termes de survie sans progression et de taux de réponse. Il n’y avait pas de différence en termes de survie globale. L’association de bévacizumab et paclitaxel était associée à moins d’effets secondaires de type hématologique. Ces résultats incitent à considérer l’association bévacizumab et paclitaxel comme une nouvelle option de traitement dans cette indication pour ces patients. Ce sont des résultats importants qui ont fait l’objet d’une présentation orale au Congrès américain de cancérologie (ASCO) et qui vont être prochainement publiés dans une grande revue médicale internationale.

    Dernière modification le mardi, 24 juillet 2018 16:59